Site web du colloque du CRESPPA "Pensée critique du genre : travail, corps, nation" qui se déroulera du 17 au 19 mai 2017 au CNRS, 59-61 rue Pouchet à Paris.
17-19 mai 2017 Paris (France)
Masculinités et représentations du maintien de la paix parmi les miliaires brésilien en Haïti
Izadora Xavier  1  
1 : Cresppa  (GTM)
Université Paris VIII Vincennes-Saint Denis

Dans cette communication, le maintien de la paix des Nations Unies sera présenté comme une activité où la masculinité militaire, ses incorporations et ses pratiques, sera étroitement liée à la reproduction des discours et des performances relatifs à l'identité nationale. À travers le cas des militaires brésiliens participant à la Mission de Nations Unies pour la Stabilisation en Haïti (MINUSTAH), j'analyserai cette activité à partir d'une optique centrée sur les acteurs de la sécurité sur le terrain. Jusqu'à présent, les études sur la participation brésilienne — et sur le maintien de la paix de façon plus générale — ont privilégié les analyses « macro-politique » : la « raison d'Etat » derrière le choix des pays contributeurs de troupes, les « caractéristiques générales » de celles-ci et les contextes locaux en vue de déterminer les raisons du succès ou de l'échec des opérations.

 

Le déplacement de la focale que je proposerai d'opérer consistera à aborder la scène internationale comme relevant non pas uniquement de dynamiques « abstraites », mais aussi d'interactions sur le terrain. Il sera essentiellement question de saisir la distance entre le « discours officiel » du Ministère des Affaires Etrangères et le discours des acteurs impliqués directement sur le terrain.

 

En ayant recours à l'historiographie et à la sociologie classique brésilienne, tout comme à la littérature scientifique contemporaine sur les rapports de « race » au Brésil, je chercherai à montrer dans quelle mesure la participation dans le maintien de la paix met à jour des idéologies raciales brésiliennes qui sont également centrales dans la formation d'un discours sur la nationalité. On verra que le discours diplomatique a tendance à expliquer le « succès » brésilien en Haïti par des discours sur la « proximité culturelle » entre le Brésil et Haïti, en mettant en avant l'influence africaine dans la constitution de la nationalité brésilienne et l'identification « post-coloniale » entre brésiliens et haïtiens. Ces éléments puiseraient dans des interprétations historiographiques du début du XXème siècle, notamment dans le travail de Gilberto Freyre.

 

En revanche, les discours des militaires sur le terrain trahissaient une complicité avec un discours plus ancien, datant du moment même où l'idée d'un Brésil « moderne » apparaissait, et dans lequel l'armée de Caxias (patron de l'armée brésilienne), « pacificateur », a joué un rôle fondamental. Le Brésil était un pays qui devait gérer la création d'un peuple unifié au lendemain de l'Abolition de l'esclavage en 1888. On verra alors que, malgré le discours « freyrista » et post-colonial justifiant la participation dans la MINUSTAH au niveau de la politique extérieure, la mise en place de cette politique s'est faite contre une autre perception de leur rôle par les agents de la sécurité, contexte dans lequel une conception différente de la nationalité — pacificatrice, « endo »-coloniale et « blanchisseuse » — circulait et était mise à jour.


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