Site web du colloque du CRESPPA "Pensée critique du genre : travail, corps, nation" qui se déroulera du 17 au 19 mai 2017 au CNRS, 59-61 rue Pouchet à Paris.
17-19 mai 2017 Paris (France)
L'impact du mouvement nationaliste sur l'émergence des féminismes non occidentaux
Somayeh Rostampour  1  
1 : CRESPPA-GTM  -  Site web
Université Paris VIII Vincennes-Saint Denis

Comme beaucoup d'études le relèvent « tous les nationalismes sont genrés ». Dans les discours nationalistes, la question de l'égalité des sexes a généralement été ignorée au nom de la libération nationale. Lorsque les militantes nationalistes soulèvent le problème des injustices qui les touchent spécifiquement à l'intérieur des mouvements nationalistes, leurs compagnons de lutte remettent systématiquement à plus tard la question de leur émancipation, une fois la nation libérée. Celles qui refusent de se conformer à cet agenda politique sont, en général, accusées de « diviser » voire même d'être des traîtres. Mais dans le cas du mouvement des femmes au Kurdistan, la participation politique des femmes, en particulier au moment de la guerre (entre la Turquie et les guérilleros du PKK) depuis 1984, est considérée comme étant plus qu'un simple outil temporaire. En effet, cet engagement est problématisé dans les réflexions des nationalistes dans le but de trouver des compromis entre les féministes et le courant du patriarcat ethnique et religieux de la cause nationaliste. Les expressions «féminismes indigènes» et «nationalisme féministe» sont généralement employées pour les désigner. La fusion du féminisme et du nationalisme constitue un point de départ précis pour distinguer les féminismes non-occidentaux de leurs homologues occidentaux car « au Moyen-Orient, le nationalisme reste une ressource puissante pour la construction identitaire, la mobilisation des femmes et la problématique du genre».

 

Consciente de la domination patriarcale dont elles font l'objet, les femmes mobilisées au sein du mouvement nationaliste au Kurdistan problématisent ce dernier enjeu en y rattachant progressivement la politisation de leur subjectivité de femmes. La singularité du mouvement des femmes kurdes est apparente dans la production d'une subjectivité féminine à travers des organisations non-mixtes féminines au sein du mouvement nationaliste-marxiste. Elles ont aussi créé un nouveau discours féministe, la Jineology fondée à la fois sur une critique du féminisme occidental et sur la constitution de ses propres mythes nationalistes (comme la matrilinéarité de la société kurde), qui défie les limites du mouvement nationalistes classiques sur la question du genre.

Dans cette présentation, je propose de soulever la question suivante : pourquoi un mouvement nationaliste de gauche choisit-il comme slogan: « Sans la libération des femmes, le Kurdistan ne sera pas libéré »? J'interrogerai également les raisons pour lesquelles les femmes, pour se débarrasser de leur statut inférieur et créer leur féminisme indigène, doivent se tourner vers les mouvements nationalistes. Cette recherche va se focaliser sur la subjectivité des femmes dans ce processus au croisement des possibilités ignorées des mouvements nationalistes. Pour se faire je m'appuierai sur un travail d'enquête (entretiens avec des combattantes kurdes et des rencontres avec les organisations de femmes au Kurdistan en Turquie)


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